Actualité juridique et fiscale : été 2024

La Direction des solutions patrimoniales d’Abeille Assurances a rassemblé les décisions de jurisprudence ainsi que les réponses ministérielles et les nouveaux textes qui peuvent vous éclairer dans la gestion de votre argent, de votre patrimoine et de votre prévoyance. Bonne lecture !

Des éclairages concernant l’assurance vie

Un droit d’accès des notaires au fichier FICOVIE rejeté par le ministre

Les notaires ont parfois du mal à établir les déclarations de succession et calculer les droits dus par les héritiers lorsque ceux-ci sont bénéficiaires d’un contrat d’assurance vie alimenté par des primes versées après les 70 ans de l’assuré et donc soumises aux droits de succession. En effet, le notaire ne connaît pas nécessairement l’identité de tous les bénéficiaires et les droits de chacun dans les capitaux décès. Or, le notaire a besoin de cette information pour attribuer la quote-part de l’abattement de 30 500 € revenant aux héritiers dont il doit établir la déclaration de succession.

Un parlementaire a donc suggéré au ministre de l’Économie et des finances d’autoriser les notaires à interroger le fichier Ficovie pour connaître tous les contrats d’assurance-vie souscrits par le défunt et l’identité des bénéficiaires lorsque des primes ont été versées après 70 ans.

Le ministre rejette la proposition pour les motifs suivants :

  • le notaire qui est mandaté par le bénéficiaire éventuel d’un contrat d’assurance vie peut déjà obtenir de l’administration fiscale les informations détenues dans le cadre de Ficovie « relatives aux contrats dont le mandant est identifié comme bénéficiaire, à l’exclusion des informations relatives à d’éventuels tiers bénéficiaires » (LPF art. L 151 B).
  • les bénéficiaires peuvent de leur côté faire une déclaration partielle de succession, la répartition de l’abattement étant alors effectuée par l’administration fiscale, qui centralise l’information relative aux différents contrats souscrits par le défunt.

Pour conclure, le ministre rappelle que, de toute manière, une déclaration rectificative est toujours possible lorsqu’une erreur est constatée dans la répartition de l’abattement…

Réponse ministérielle Habib, AN, 9 janvier 2024, n° 11247

Des primes manifestement exagérées évaluées au regard de la situation patrimoniale d’ensemble

Un frère demande le rapport à la succession du capital de 86 700 € versé à sa sœur au titre du contrat d’assurance-vie souscrit par leur mère et alimenté par :

  • un versement initial de 34 800 € alors que la souscriptrice n’avait pas de revenus propres et que son foyer était non imposable ;
  • un versement de 22 800 € alors que la souscriptrice venait d’être placée sous curatelle, exercée par sa fille ;
  • un dernier versement de 6 400 € effectué le lendemain même du décès de l’époux de la souscriptrice.

Au vu de ces éléments, la Cour d’appel considère les primes manifestement exagérées.

La Cour de cassation rejette le caractère manifestement exagéré des primes versées, au motif que les primes versées par le souscripteur d’un contrat d’assurance vie ne sont rapportables à la succession que si elles présentent un caractère manifestement exagéré, eu égard à ses facultés, apprécié au moment du versement, au regard des seuls critères de l’âge, des situations patrimoniale et familiale du souscripteur ainsi que de l’utilité du contrat pour celui-ci.

Elle reproche aux juges du fond de n’avoir pas regardé la situation patrimoniale globale de la souscriptrice et notamment de n’avoir pas tenu compte de son patrimoine immobilier et des 80 000 € de liquidités qu’elle détenait lors du premier versement.

De plus, la Cour d’appel s’est prononcée pour les deux autres primes en fonction d’éléments autres que l’âge, la situation patrimoniale et familiale de la souscriptrice et l’utilité du contrat pour elle. Elle a en effet tenu compte du fait que la souscriptrice avait été placée sous curatelle exercée par sa fille avant le versement de la deuxième prime et que la dernière prime avait été versée le lendemain du décès de l’époux de la souscriptrice.

La morale de l’arrêt est donc qu’il faut étudier le caractère manifestement exagéré des primes versées eu égard aux facultés du souscripteur :

  • Au regard de sa situation patrimoniale d’ensemble au jour du versement des primes ;
  • Sans s’écarter des critères énoncés par la jurisprudence (les juges du fond n’auraient pas dû, au cas présent, faire référence au conflit d’intérêt résultant de la double qualité de bénéficiaire et curatrice de la fille).

Arrêt de la Cour de cassation, 2 mai 2024, 1ère civ. n° 22-14.829

Des éclairages concernant la fiscalité

L’option pour l’intégration dans les revenus soumis au barème progressif des intérêts est irrévocable

Les revenus financiers du contribuable (y compris les intérêts des contrats d’assurance vie issus des primes versées depuis le 26 septembre 2017) sont en principe soumis au PFU de 12,8 % (+ 17,2 % de prélèvements sociaux). Toutefois, le contribuable qui y a intérêt, peut écarter le PFU en optant, lors de sa déclaration de revenus, pour l’intégration de tous ses revenus financiers dans son revenu imposable soumis au barème progressif.

Dans une réponse à un député (Réponse Klinkert, question n° 3778, JOAN du 24 octobre 2023), le ministre des Comptes publics rappelle que l’option pour le barème progressif exercée au titre d’une année est irrévocable. Le contribuable ne peut y renoncer, y compris en cas de contrôle ou de redressement.

Le Conseil d’Etat a confirmé cette réponse, considérant qu’elle n’ajoutait pas à la loi, laquelle ne porte pas atteinte aux droits et libertés garantis par la constitution.

Il est à noter qu’à l’inverse, le contribuable qui n’a pas opté pour l’imposition au barème progressif de ses revenus financiers peut exercer son option a posteriori, à la suite d’un contrôle, ou en dehors de toute procédure, dans le délai de réclamation.

Avis du Conseil d’Etat du 5 avril 2024, n° 490411

Imposition systématique des prestations de prévoyance reçues par un TNS en compensation d’une perte de revenus

Dès lors que les prestations sont versées en compensation de la diminution de son revenu d’activité imposable, les indemnités versées à un travailleur indépendant entrent dans son BNC imposable. Cette réintégration dans son BNC s’effectue quand bien même les cotisations en amont auraient été versées hors du cadre d’un contrat d’assurance de groupe Madelin et donc non déduites de son revenu imposable.

Arrêt de la CAA de Nantes du 19 mars 2024, n° 23NT02189

Pas d’exonération d’IFI pour les activités déficitaires des LMP

Les biens et les droits immobiliers affectés à une activité principale industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale sont exonérés d'impôt sur la fortune immobilière (IFI).

Il est admis que l’activité de loueur en meublé soit considérée comme étant une activité commerciale ouvrant droit au bénéfice de cette exonération d’IFI si elle est exercée à titre principal par le contribuable et lui permet de :

  • réaliser plus de 23 000 € de recettes annuelles ;
  • retirer de cette activité plus de 50 % de ses revenus.

Le gouvernement rappelle que l’exercice de l’activité de loueur en meublé doit en outre être bénéficiaire. L’activité de LMP ne peut ouvrir droit au bénéfice de l’exonération d’IFI lorsqu’elle est « déficitaire ».

Le gouvernement a déjà eu l’occasion de préciser que l’activité de location en meublé professionnelle (LMP) exercée de façon accessoire à une autre activité, également source de revenus, permet de bénéficier de l’exonération d’IFI uniquement si elle est « bénéficiaire ». Donc en cas d’activité de LMP  « déficitaire », l’avantage fiscal ne sera pas applicable. Selon le ministre, seuls les locaux loués meublés qui sont source de revenus pour le foyer et non de déficit sont donc éligibles au régime des actifs professionnels exonérés d’IFI, à l’exclusion des locaux d'habitation meublés qui dégagent un résultat déficitaire.

Réponse ministérielle Vidal, AN, 9 avril 2024, n° 9897

Pas d’exonération d’IFI pour les parts de société de personnes en l’absence d’activité professionnelle effective

  • Deux époux sont associés d’une SARL à l’impôt sur le revenu exerçant une activité de location de logements meublés par le biais des biens suivants :
  • Deux fois quatre chambres dans deux résidences étudiantes séparées
  • Onze chambres dans un EHPAD
  • Treize appartements et un local commercial équipé dans un bâtiment d’habitation.

Ils demandent l’exonération d’IFI pour les parts détenues au sein de la SARL considérant que, bien que retraités, ils y exercent une activité professionnelle à titre principal de manière effective.

La Cour de cassation rejette leur demande au motif que :

  • Les chambres en résidence étudiante sont éloignées géographiquement et gérées par le Groupe Réside Etudes ;
  • Les chambres en EHPAD sont gérées par la société DOMUS VI ;
  • Les appartements sont gérés par la société FONCIA ;

Les époux ne peuvent donc pas prétendre gérer eux-mêmes les biens immobiliers concernés et exercer une activité professionnelle effective.

Arrêt de la Cour de cassation, 30 avril 2024, n° RG 22/01600

Précision concernant le lien entre résidence fiscale et travail en France

L’article 4 B du CGI, dispose qu’une personne qui exerce en France une activité professionnelle à titre non accessoire est réputée avoir son domicile fiscal en France. Le Conseil d’État rappelle que cela vaut même si la personne est considérée comme résidente d’un autre État en application d’une convention fiscale bilatérale.

Arrêt du Conseil d’Etat du 5 février 2024, n° 469771

Des éclairages concernant la prévoyance

Maintien des garanties de prévoyance aux anciens salariés en cas de liquidation judiciaire

En application de l’article L 911-8 du code de la sécurité sociale, les anciens salariés ont droit au maintien à titre gratuit de leur couverture de prévoyance et frais de santé pendant un an en cas de départ de l’entreprise pour une cause autre qu’une faute lourde, et à partir du moment où ils s’ouvrent le droit à prise en charge par l’assurance chômage.

Toutefois, le droit des anciens salariés au maintien de leur couverture collective frais de santé ne fait pas obstacle à l’exercice par l’organisme assureur de son droit à la résiliation annuelle, mettant un terme au maintien des garanties.

En cas de liquidation judiciaire entraînant le licenciement des salariés, l’assureur est donc en droit de résilier le contrat collectif pour ne pas avoir à couvrir gratuitement les salariés licenciés.

Arrêt de la Cour de cassation, 2ème civ. 15 février 2024, n° 22-16.132

Des éclairages concernant la protection sociale

Impact de l’abattement de 26 % sur les cotisations sociales des travailleurs indépendants

En application de la dernière loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, l’assiette de la CSG-CRDS, constituée par le bénéfice imposable brute de cotisations sociales, fait désormais l’objet d’un abattement de 26 % pour tenir compte des cotisations sociales. Le décret du 5 juillet 2024 vient préciser que cet abattement ne peut être inférieur à 1,76 % du PASS ni supérieur à 130 % du PASS.

En contrepartie, les cotisations retraite et maladie verront leur taux augmenter.

De la sorte, le montant de CSG-CRDS non contributive de droits diminue du fait de l’abattement d’assiette pendant que les cotisations retraite et maladie contributives de droits augmentent.

La mesure entre en vigueur à compter du 1er janvier 2025.

Décret n° 2024-688 du 5 juillet 2024

Retraite complémentaire des auto-entrepreneurs exerçant une activité libérale

Le taux du versement forfaitaire global acquitté sur leurs recettes par les auto-entrepreneurs relevant de la CIPAV au titre des cotisations sociales est passé au 1er juillet 2024 de 21,2 % à 23,2 %.

Le taux du versement forfaitaire global acquitté sur leurs recettes par les auto-entrepreneurs exerçant une profession libérale mais ne relevant pas de la CIPAV passe pour sa part à 23,1 % au 1er juillet 2024, 24,6 % au 1er janvier 2025 et 26,1 % au 1er janvier 2026. Cette augmentation leur permettra d’acquérir des droits à retraite complémentaire, pour une fraction de la cotisation de 7,85 % au 1er juillet 2024, 13 % au 1er janvier 2025 et 17,7 % au 1er janvier 2026.

Décret n° 2024-484 du 30 mai

Des éclairages concernant l’épargne salariale

L’abondement de l’employeur doit être calculé de façon uniforme pour tous les salariés

L’abondement de l’employeur à un PEE, PERCO ou PERECO n’est exonéré de cotisations sociales que s’il revêt un caractère collectif, c’est-à-dire qu’il doit pouvoir profiter à tous les salariés dans des conditions identiques.

Tel n’est pas le cas lorsque l’abondement, calculé sur 100 % du versement du salarié, est plafonné à hauteur de 0,5 % du salaire mensuel jusqu’à 4 000 € et à hauteur de 2,5 % du salaire pour la fraction comprise entre 4 000 et 18 535 €. Il en résulte en effet que l’abondement est alors proportionnellement plus élevé pour les salariés ayant une rémunération mensuelle supérieure à 4 000 €, en méconnaissance du caractère collectif de l’abondement.

Arrêt de la Cour de cassation du 1er février 2024, 2ème civ. n° C 22-16.581

Relèvement des plafonds de versements unilatéraux aux plans d’épargne salariale ou retraite

Pour le PEE : Le plafond du versement unilatéral de l’employeur destiné à l’acquisition d’actions ou certificats d’investissement émis par l’entreprise passe de 2 % du PASS à 3 000 € (alignement sur la prime de partage de la valeur ou PPV).

Le plafond est porté à 6 000 € pour les associations et fondations ainsi que pour les employeurs ayant mis en place un dispositif d’intéressement ou un dispositif de participation sans y être légalement obligé.

Par ailleurs, le plafond global de l’abondement de l’employeur passe de 8 % à 16 % du PASS en cas de versement unilatéral de l’employeur.

PERCO ou PERECO : Par alignement sur la PPV, le plafond des versements unilatéraux initiaux et périodiques de l’employeur passe là encore de 2 % du PASS à 3 000 €, plafond porté à 6 000 € dans le cas d’un employeur ayant mis en place un dispositif d’intéressement ou de participation sans y être légalement obligé.

Décret n ° 2024-644 et 2024-690 du 29 juin et 5 juillet 2024

N’hésitez pas à contacter votre agent général Abeille Assurances sur l’un ou l’autre de ces sujets afin qu’il vous apporte tout éclairage utile. Il pourra aussi vous présenter les solutions dont nous disposons en terme d’assurance vie, d’épargne retraite individuelle ou collective et de prévoyance individuelle ou collective.

Document non contractuel d'information générale à jour le 03/09/2024

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